Les prestataires privés de l'État et des collectivités sont-ils tenus à la neutralité religieuse dans le cadre de leurs prestations ?
Après les deux tours de l’élection présidentielle, deux enquêtes ont mesuré le vote d’électeurs en fonction de la confession à laquelle ils affirment appartenir.
Existe-t-il un vote « religieux » ? La question avait déjà été soulevée en 2012, lors de l’élection présidentielle. À l’époque, un sondage de l’Ifop (1) indiquait que 57% des électeurs se déclarant de confession musulmane avaient voté pour François Hollande au premier tour, 86% au deuxième tour. Une étude de 2011 du Cevipof (centre de recherches de Sciences Po) indiquait que les électeurs musulmans représentaient environ 5% du corps électoral.
En 2017, deux enquêtes (2) de l’Ifop pour Pèlerin et La Croix ont mesuré les votes en fonction des convictions religieuses. Pour le premier tour :
- Les interrogés qui se déclarent catholiques ont voté à 28% pour François Fillon, 22% pour Emmanuel Macron, 22% pour Marine Le Pen et à 14% pour Jean-Luc Mélenchon.
- Du côté des protestants, 30% pour Emmanuel Macron, 20% pour François Fillon, 20% pour Marine Le Pen, 16% pour Jean-Luc Mélenchon.
- Les sondés qui se considèrent comme musulmans ont déclaré avoir voté à 37% pour Jean-Luc Mélenchon, 24% pour Emmanuel Macron, 17% pour Benoît Hamon et 10% pour François Fillon.
- Les « sans religion » ont davantage voté pour Jean-Luc Mélenchon (28%), puis Emmanuel Macron (24%), Marine Le Pen (23%) et François Fillon (9%).
Au deuxième tour, l’étude indique que 62% des sondés qui se disent catholiques ont voté pour Emmanuel Macron, 67% chez les protestants, 92% chez les musulmans, 70% des « sans religion ».
Chez les catholiques, une segmentation en fonction du degré de pratique religieuse (quatre catégories de « pratiquants » à « non-pratiquants » en passant par « pratiquants réguliers » et « pratiquants occasionnels) a été opérée. Il en ressort que les « pratiquants occasionnels » et les « non-pratiquants » enregistrent les plus forts taux de vote Front national (46% et 39% des 38% qui ont voté Le Pen) par rapport aux autres catégories, ce qui était déjà le cas au premier tour.
Pour le deuxième tour, des responsables religieux juifs, musulmans et protestants recommandaient aux fidèles de ne pas voter pour Marine Le Pen en citant parfois explicitement le nom d’Emmanuel Macron. De son côté, l’Église catholique indiquait qu’elle « n’appelle pas à voter pour l’un ou l’autre candidat » et donnait simplement des « éléments d’éclairage ».
Quel crédit accorder à ces études de votes « religieux » ? Des chercheurs se sont posé la question du lien entre les convictions religieuses et les choix politiques lors d’un colloque en janvier 2017. Ils réfutent l’idée que le facteur religieux serait négligeable parce qu’il y a moins de croyants mais aussi celle selon laquelle un « retour du religieux » influencerait fortement les votes. Les convictions religieuses restent un élément important pour les individus et sont une variable assez fiable pour estimer leurs votes.
(1) Sondage réalisé à partir d’un échantillon cumulé de 14 200 électeurs inscrits sur les listes électorales, dont 680 personnes se déclarant de confession musulmane.
(2) Sondage pour Pèlerin mené auprès d’un échantillon représentatif de 5 770 personnes inscrites sur les listes électorales, par questionnaire en ligne, le 23 avril 2017 ; Sondage pour La Croix/Pèlerin auprès d’un échantillon représentatif de 4 330 personnes inscrites sur les listes électorales via un questionnaire en ligne le 7 mai 2017 et un cumul d’interviews réalisées du 4 au 7 mai.
Pour aller plus loin :