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Didier Leschi, directeur général de l’Office Français de l’Immigration et de l’intégration (OFII) et président de l’Institut Européen en Science des Relations (IESR). 

Les immigrés d’aujourd’hui sont-ils plus religieux que les autres ? Pourquoi le processus de radicalisation touche-t-il plus souvent les immigrés ou enfants d’immigrés issus de l’aire arabo-musulmane ou d’Afrique subsaharienne ? A toutes ces questions, Didier Leschi, directeur général de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) et président de l’Institut européen en science des religions (IESR) apporte des réponses claires et franches : les difficultés des derniers arrivés ne sont que le reflet de la décomposition des pays d’origine et de l’effondrement du courant laïque dans le monde.

Les immigrés sont-ils plus religieux ou moins sécularisés ?

Didier Leschi : On estime qu’en France, les immigrés, au sens de l’INSEE, c’est-à-dire ceux qui sont nés à l’étranger, représentent environ 11% de la population. Or, un basculement s’est opéré dans les années 1990. Depuis cette période, une majorité d’immigrés vient du Maghreb avec une forte poussée de l’Afrique subsaharienne. Cela a un effet démographique sur notre jeunesse puisqu’aujourd’hui, environ 17% des moins de 24 ans ont un rapport avec ces régions du monde, contre seulement 3% en 1968.

Ces immigrations nouvelles, même si l’immigration algérienne a plus de cent ans, proviennent d’un certain nombre de pays d’émigration dont les sociétés, les structures politiques, les organisations politiques se sont de plus en plus éloignées des sociétés d’immigration. C’est particulièrement vrai en ce qui concerne les codes sociaux, la manière de penser la liberté de culte, avec des évolutions dans les différents pays en particulier dans l’aire arabo-musulmane, qui ont fait apparaître une montée de l’intégrisme musulman sunnite. Sur cet intégrisme religieux se sont développés des courants littéralistes qui ont réussi à attirer une partie des jeunes vers des formes de radicalité qui ont accentué ce qui était déjà à l’œuvre dans ce basculement conservateur : le refus de l’altérité, de l’autre, de notre commune humanité, de la différence. Cette accentuation est le reflet culturel de l’involution des sociétés de l’aire arabo-musulmane qui pèse sur la conscience des gens. Les personnes qui arrivent viennent de plus en plus souvent de sociétés déstructurées sur la longue durée, déstructurées en tant qu’Etat, déstructurées socialement, moralement, intellectuellement.

Le dernier phénomène qui entre en ligne de compte, ce sont les moyens de communication modernes, comme la télévision, qui favorisent des logiques d’enfermement qu’on a du mal à contrebalancer. On est la télévision qu’on regarde. Des communautés nationales ou culturelles sont en permanence branchées sur des programmes de télévision qui peuvent diffuser de l’antisémitisme par exemple ou des programmes culturels classiques qui eux-mêmes reflètent les involutions de ces sociétés, contrairement à Internet qui permet de regarder différentes choses. Tout cela finit par être un frein à l’intégration, au partage de valeurs communes.`

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